Fondé en 1438 et confié à l’Ordre de la Sainte-Croix, le lieu fut tour à tour caserne militaire, dépôt d’armes, station de recherche agricole, église de fortune… avant de tomber en ruine. Mais comme souvent dans les belles histoires, un sauveur surgit : Camille Oostwegel, hôtelier visionnaire, qui en 2000 décide de faire renaître le monastère. Entouré de l’architecte Henk Vos et du magicien de la lumière Ingo Maurer, il transforme ce vénérable édifice en un hôtel qui conjugue passé et futur avec une audace réjouissante.
Entre ciel gothique et design iconique
Entrez, et vous voilà dans une nef gothique où l’on croise pêle-mêle des vitraux du Moyen Âge (patinés d’histoire et réinventés à l’identique), un ascenseur en verre qui semble flotter, et des luminaires suspendus comme des étoiles contemporaines. Aux murs de pierre médiévaux répondent des pièces signées Le Corbusier, Philippe Starck, Rietveld. Résultat : un dialogue architectural aussi audacieux qu’harmonieux.
Et puisqu’ici on aime marier les contrastes, chaque chambre (60 en tout, et toutes différentes !) est une rencontre entre sobriété moderne et âme historique. Elles cachent toutes des œuvres d’art et sont de véritables cocons où se mêlent luxe discret et sérénité.
Spencer’s – La gastronomie perchée
Suspendu sur la mezzanine au cœur de la nef gothique, le Spencer’s Restaurant est le joyau du Kruisherenhotel. Chaque repas sous ces voûtes célestes est une expérience suspendue entre histoire et modernité.
Dès le matin, le buffet du petit déjeuner déploie un faste irrésistible : bulles délicates, notes toniques de gingembre, douceurs artisanales et gourmandises salées rivalisent d’élégance pour réveiller les sens. Une mise en bouche royale qui donne le ton d’un séjour placé sous le signe du raffinement. On garde un souvenir ému de la tarte aux cerises de la Bakkerij Hermans, véritable institution à Maestricht.
Le soir, place à une partition gastronomique orchestrée par le chef Camiel Custers : une cuisine contemporaine et inspirée, jouant sur l’équilibre des textures, des arômes et des saisons. Ici, chaque assiette dialogue avec la majesté du décor gothique, créant un contraste envoûtant entre la pureté des saveurs et la grandeur du lieu. Entre ciel et table, on ne sait plus s’il faut lever les yeux vers les fresques célestes… ou se concentrer sur la divine assiette.
Et pour prolonger l’extase, direction le Wine Bar, installé dans l’ancien chœur de l’église. Sa cave à vin hors-sol, spectaculaire, est l’endroit rêvé pour faire une pause spirituelle… au sens œnologique du terme.
Un futur aussi prometteur que son passé
Parce que les Oostwegel n’ont pas pour habitude de s’endormir sur leurs lauriers, une extension ambitieuse est prévue pour 2028 : l’Académie des Arts voisine, datant de 1903, deviendra un nouvel écrin de 25 chambres et d’un restaurant étoilé, reliés à l’hôtel par une passerelle aérienne au-dessus de la route. Une métaphore parfaite de ce lieu : un pont entre les époques, entre la rigueur monastique et la légèreté contemporaine.
L’art, une respiration permanente
Sous l’œil de Françoise Oostwegel, designer et curatrice, le Kruisherenhotel vibre aussi comme une galerie vivante. Les expositions temporaires se succèdent, les œuvres s’invitent dans le quotidien des hôtes, et – cerise sur le gâteau – elles sont disponibles à la vente. Ici, on ne se contente pas de séjourner : on vit au cœur d’un dialogue permanent entre art, histoire et hospitalité.
L’âme des pierres devenue art de vivre
Le Kruisherenhotel n’est pas seulement un hôtel, ou un simple restaurant. C’est une expérience sensorielle totale, un voyage dans le temps et dans l’espace, où l’on passe sans effort des psaumes aux bulles de champagne, du gothique au design, de la méditation silencieuse aux saveurs éclatantes.
Bref, ici, même les moines auraient probablement levé leur verre…
